Dans le secteur des médias, les mauvaises nouvelles se succèdent: licenciements et mises en préretraite sont légion. Face à la déferlante de «fake news», les titres de presse font du «fact-checking» le garant de leur crédibilité. Parallèlement, les réseaux sociaux court-circuitent les médias mainstream. Les «gilets jaunes» s'en sont emparé…
«Die Ferien sind vorbei – Ich sortiere aus, werfe weg, gebe fort»
«La bérézina des médias»
1. (Screenshot/chaîne YouTube «Born to be jaune»)
La bérézina des médias
Les annonceurs des titres de presse traditionnels se défilent, et leur lectorat fond comme
la banquise. Par conséquent, les rédactions aussi. Rebaptisées «newsrooms», elles ne
rédigent plus des articles mais produisent des «contenus». Le secteur des médias
s’apparente à un champ de bataille.
Licenciements et mises en préretraite
Dans le secteur des médias, les mauvaises nouvelles se succèdent. Aujourd’hui, c’est Tamedia qui
licencie (encore). En novembre 2018, c’était CH Media, groupe né du rapprochement entre
AZ Medien et le groupe NZZ, qui renvoyait dans leur foyer quelque 200 collaborateurs. Au printemps
dernier, les Suisses romands ont vu la disparition de leur quotidien «Le Matin» (de la lecture de
bistrot, soit, mais leur quotidien). Et début 2017, «L’hebdo», fondé en septembre 1981, cessait
de paraître.
«Non, ma fille, tu ne veux pas faire comme papa et maman, cherche-toi un autre job.» Mais quoi? Le
fait est que l’on est bien embêté pour conseiller à ses enfants une orientation professionnelle.
Une quête obsessionnelle de crédibilité
D’accord, les journalistes ne sont pas les seuls à être mis à mal, nombre de gouvernements
connaissent également des bouleversements inédits depuis des décennies. Il n’empêche
que «La Croix» a publié son baromètre de la confiance des Français dans les médias. Rien de
réjouissant: crédibilité et perception de l’indépendance des journalistes en berne. Même
chose outre-Atlantique, le dernier sondage Gallup montre que la confiance vis-à-vis des médias
mainstream n’a jamais été si basse.
2. La situation profite (un peu) aux journaux gratuits qui se contentent de survoler l’actualité et de
truffer leurs publications de communications sur les pipeuls, ainsi qu’aux médias nés sur les réseaux
sociaux, comme ceux lancés par les «gilets jaunes».
Espérons que survivront les titres de presse les plus «sérieux», les plus crédibles, comme «Le Monde
diplomatique». Des médias qui diffusent des informations «fact-checkées». Le «fact-checking» est
dans toutes les bouches et sous toutes les plumes – ou devrait-on dire sur tous les claviers? Face à
la marée des «fake news», la quête de crédibilité est devenue obsessionnelle.
Les réseaux sociaux court-circuitent les médias mainstream
Les adeptes du mouvement des «gilets jaunes» se défient des médias mainstream. Pour eux, la seule
façon de communiquer sans triche est la leur, via Facebook live et chaîne YouTube. Quoique, quand
on surfe sur leurs plateformes, il devient vite évident que l’information diffusée est largement
biaisée. Quid du débat démocratique?
Les réseaux sociaux fédèrent les gilets jaunes, se font l’écho de leurs revendications et,
éventuellement, servent d’outils pour manipuler les foules, tout comme les médias qu’ils décrient.
Des gilets jaunes s’en sont pris violemment à des journalistes, sous prétexte que les médias
traditionnels sont à la solde du gouvernement. Le chef de file Éric Drouet se vante toutefois d’avoir
programmé son arrestation.
Les réseaux sociaux court-circuitent les titres de presse et les chaînes TV les plus populaires. Deux
mondes s’affrontent, et chacun communique selon ses propres codes. La communication entre les
deux, n’en déplaise aux grands débatteurs, ne risque ainsi pas de s’améliorer.
Pensez SEO!
Pour les collaborateurs des médias ayant débuté leur carrière à la fin du siècle dernier, la pilule
peut être amère. Leurs connaissances et leur savoir-faire n’ont plus guère de valeur. Quant à moi,
soucieuse de ne pas rester au bord du chemin, j’ai suivi un cours sur «l’écriture web». «Oubliez les
adjectifs, utilisez les adverbes avec une extrême parcimonie, répétez les mots-clés x fois dans les
premières lignes de votre article, pensez SEO», telles étaient les consignes. Un vrai choc pour une
amoureuse de la langue, formée dans une université à vocation littéraire. Mais bon, puisque c’est
cela ou rien…
Alors, bien sûr, ce post de Marco Peter publié sur LinkedIn, intitulé «Warum SEO im Jahre 2019
ein Auslaufmodell ist» («Pourquoi le SEO est un modèle dépassé en 2019») m’a fait grand plaisir.
Il cite Bill Gates – «Content is King» – et insiste sur la nécessité de prioriser la qualité des contenus –
«Just make GREAT stuff!»
Rédactrice free-lance basée à Zurich, Sylvie Castagné s’intéresse notamment à l’impact de la transformation numérique
sur nos vies.