2. Mais ça gratte trop. Je ne résiste pas. Je glisse le bout de l’index dans mon
oreille. Une fois rentrée, j’ajoute au rituel du lavage-désinfection un coton-tige
dans le pavillon de l’oreille gauche.
Incursion en terrain contaminé
La dernière fois que je me suis hasardée au-delà des limites de ma petite
commune, c’était pour aller faire un reportage en plein «cluster» du Grand-Est.
Le samedi précédant la fermeture des écoles. Avant de rentrer, passage au
supermarché. Un gymkhana dans un océan de caddies débordant de produits
d’hygiène et de plats tout prêts. Puis une coquette auberge alsacienne à la
façade colorée et fleurie. Déserte. Une patronne avec qui j’échange quelques
mots à distance. Elle vient de rendre visite à son fils, ingénieur à Wuhan. Des
rideaux à carreaux dont elle va vérifier la fermeture plusieurs fois pendant que
je déjeune à la table du fond. Une ambiance à la Simenon.
J’ai l’impression d’avoir fait une incursion en terrain ennemi.
Temps long
Ma fille rapatriée en urgence du bout du monde s’ennuie parfois. Elle trouve le
temps long. Moi, ça va. J’aime ça, le temps long. Ce sentiment délicieux,
souvenir d’enfance, des heures qui s’égrènent tout doucement dans le jardin
au bord de la Dordogne. Les grands-mères qui papotent à l’ombre d’un noyer
après la cueillette des haricots. La fraîcheur attendue, que l’on sent arriver petit
à petit.
Ces dernières semaines, j’ai relu une dizaine de livres, écouté «La peste» et «Le
hussard sur le toit», des histoires d’épidémies, tout en fabriquant des masques
avec des chutes de tissu. Cousus main, petits points.
Alors me précipiter pour reprendre ma vie d’avant comme avant… Je crois que
je vais déguster encore un peu mon confinement.
1er
mai 2020
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