Baroque ou bizarre? Avatars de la bizarrerie aux XVIe et XVIIe siècles (France, Espagne, Italie), Liliane Picciola (coord.), Presses Universitaires de Paris Ouest (Francia), 2016, p. 59-73. ISBN: 978-28-401-6249-0.
http://presses.parisnanterre.fr/?p=3111
Abstract: Mythology Narrated for Children, and History of Great Men of Greece, by Fernán Caballero (1865), is a work of a markedly pedagogical and moral character: it avoids scabrous references and highlights the profitable content. His reading is very pleasant and enjoyable. His editorial success and careful composition help to understand the didactic ways in the history of mythology.
Resumen: La Mitología contada a los niños e historia de los grandes hombres de la Grecia, de Fernán Caballero (1865), es una obra de carácter marcadamente pedagógico y moral: evita las referencias escabrosas y pone de relieve el contenido provechoso. Su lectura es muy agradable y amena. Su éxito editorial y su cuidada composición ayudan a comprender los caminos didácticos de la historia de la mitología.
Le Magazine Littéraire - L'âge de fission - Mai 2011
Dans Le Hêtre et le Bouleau, son précédent livre,
Camille de Toledo tâchait de regarder et de comprendre
« la tristesse européenne ", la nôtre, celle des
enfants d'un siècle brisé dont on ne peut hériter.
, Camille de Toledo désigne Vies p0tentielles comme
un «livre de solitudes" de «vies fissurées ", une galerie d'orphelins,
ceux qui tentent de vivre à l'orée du XXIe siècle.
Le Matricule des anges - Celui qui reste - N°122 Avril 2011
Camille de Toledo cherche dans la littérature à s'affranchir de tous les déterminismes et à penser
radicalement le :XXle siècle. Coupé volontairement de sa famille, la mort et l'écriture l'enjoignent
aujourd'hui de renouer avec ses origines. À rebours peut-être du premier élan.
Dossier pédagogique autour de "Peau d'âne" de Jean-Michel Rabeux d'après Charles Perrault - dans une collection coordonnée par le CRDP de l'Académie de Paris
“L’Espagne et L’Astrée”, Lire “l’Astrée”, Actes du colloque international de Paris (4-6 octobre 2007), Delphine Denis (ed.), París, PUPS, 2008, pp. 43-50. ISBN: 978-2-84050-613-3.
“Maures et chrétiens dans la littérature du XVIIe siècle. Questions sur l’imaginaire à propos de 'Zaïde'”, Histoire, littérature et poétique des Marches. Actes du XXIVe Congrès de la Société Française de Littérature Générale et Comparée, Olivier-Henri Bonnerot (ed.), Estrasburgo, Imprimerie intégrée de l’Université des Sciences Humaines de Strasbourg, 1993, pp. 115-129.
“Le legs de l’histoire dans le théâtre espagnol et français du XVIIe siècle. III: La conception de la femme”, Anales de Filología Francesa (Murcia), 8, 1997, pp. 107-127. ISSN: 0213-2958.
Abstract: Mythology Narrated for Children, and History of Great Men of Greece, by Fernán Caballero (1865), is a work of a markedly pedagogical and moral character: it avoids scabrous references and highlights the profitable content. His reading is very pleasant and enjoyable. His editorial success and careful composition help to understand the didactic ways in the history of mythology.
Resumen: La Mitología contada a los niños e historia de los grandes hombres de la Grecia, de Fernán Caballero (1865), es una obra de carácter marcadamente pedagógico y moral: evita las referencias escabrosas y pone de relieve el contenido provechoso. Su lectura es muy agradable y amena. Su éxito editorial y su cuidada composición ayudan a comprender los caminos didácticos de la historia de la mitología.
Le Magazine Littéraire - L'âge de fission - Mai 2011
Dans Le Hêtre et le Bouleau, son précédent livre,
Camille de Toledo tâchait de regarder et de comprendre
« la tristesse européenne ", la nôtre, celle des
enfants d'un siècle brisé dont on ne peut hériter.
, Camille de Toledo désigne Vies p0tentielles comme
un «livre de solitudes" de «vies fissurées ", une galerie d'orphelins,
ceux qui tentent de vivre à l'orée du XXIe siècle.
Le Matricule des anges - Celui qui reste - N°122 Avril 2011
Camille de Toledo cherche dans la littérature à s'affranchir de tous les déterminismes et à penser
radicalement le :XXle siècle. Coupé volontairement de sa famille, la mort et l'écriture l'enjoignent
aujourd'hui de renouer avec ses origines. À rebours peut-être du premier élan.
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Similaire à Les mots 'bizarre', 'bizarrerie' / 'bizarro', 'bizarría' et leur valeur heuristique dans la critique française et espagnole du XVIIe siècle
“L’Espagne et L’Astrée”, Lire “l’Astrée”, Actes du colloque international de Paris (4-6 octobre 2007), Delphine Denis (ed.), París, PUPS, 2008, pp. 43-50. ISBN: 978-2-84050-613-3.
“Maures et chrétiens dans la littérature du XVIIe siècle. Questions sur l’imaginaire à propos de 'Zaïde'”, Histoire, littérature et poétique des Marches. Actes du XXIVe Congrès de la Société Française de Littérature Générale et Comparée, Olivier-Henri Bonnerot (ed.), Estrasburgo, Imprimerie intégrée de l’Université des Sciences Humaines de Strasbourg, 1993, pp. 115-129.
“Le legs de l’histoire dans le théâtre espagnol et français du XVIIe siècle. III: La conception de la femme”, Anales de Filología Francesa (Murcia), 8, 1997, pp. 107-127. ISSN: 0213-2958.
“Le legs de l’histoire dans le théâtre espagnol et français du XVIIe siècle. II: Autour du mariage”, Anales de Filología Francesa (Murcia), 7, 1995, pp. 73-89. ISSN: 0213-2958.
“Une querelle de salon: France, Italie, Espagne”, Papers on French Seventeenth Century Literature (Tubinga), 33, 64, 2006, pp. 269-276. ISSN: 0343-9368.
“Hispanisme” (Don Juan), Dictionnaire de Don Juan, Pierre Brunel (dir.), París, Robert Laffont, col. “Bouquins”, 1999, pp. 466-468. ISBN: 978-2221078662.
Ils jouent tous Sahkespeare, comme s'il était un vaudeville alors qu'il est un génie, mais un génie de l'ébullition lente des volcans et de l'explosion soudaine de la colère populaire en confinement pandémique depuis bientôt un an.
Il est un monstre de toutes les horreurs mais sacré par toutes les églises du monde, et même les chapelles, et on me dit les mosquées. Il n'est pas une âme au monde qui cracherait sur Shakespeare, et pourtant combien il mériterait qu'on lui mette une fessée de temps ebn temps.
“Fortunes et infortunes du précepte horatien utile dulci dans la littérature française: essai d’interprétation du Classicisme à la Modernité”, Çédille. Revista de Estudios Franceses (Santa Cruz de Tenerife), 15 (abril 2019), pp. 333-354. ISSN: 1699-4949.
TRAVAIL DE TERESA DELGADO RODRÍGUEZ ET IRENE LEFAIX FERNÁNDEZ (2 TRIM)manusp14
TRAVAIL DE TERESA DELGADO RODRÍGUEZ ET IRENE LEFAIX FERNÁNDEZ
Similaire à Les mots 'bizarre', 'bizarrerie' / 'bizarro', 'bizarría' et leur valeur heuristique dans la critique française et espagnole du XVIIe siècle (20)
Mythical Narratives in Comparative European Literature / Le récit mythique dans la littérature européenne comparée, CompLit. Journal of European Literature, Arts and Society, Asun López-Varela y José Manuel Losada (dir.), 7 (2024), París, Classiques Garnier, 236 p. ISSN 2780-2523. ISBN 978-2-406-16969-7.
― https://dx.doi.org/10.48611/isbn.978-2-406-16970-3.p.0009
― https://classiques-garnier.com/complit-journal-of-european-literature-arts-and-society-en.html
“The Referential Function of Myth”, Mythical Narratives in Comparative European Literature, CompLit. Journal of European Literature, Arts and Society, París, Classiques Garnier, 7 (2024), pp. 21-39. ISSN 2780-2523. ISBN 978-2-406-16969-7.
― https://dx.doi.org/10.48611/isbn.978-2-406-16970-3.p.0023
― https://classiques-garnier.com/complit-journal-of-european-literature-arts-and-society-en.html
“Introduction” (Asun López-Varela y José Manuel Losada), Mythical Narratives in Comparative European Literature, en CompLit. Journal of European Literature, Arts and Society, París, Classiques Garnier, 7 (2024), pp. 13-19. ISSN 2780-2523. ISBN 978-2-406-16969-7.
― https://classiques-garnier.com/complit-journal-of-european-literature-arts-and-society-en.html
“Mito y mitocrítica cultural: un itinerario personal”, Mito: teorías de un concepto controvertido, Madrid, Sial Pigmalión, 2024, pp. 83-95. ISBN 978-84-19928-03-0.
The bibliography on modern reworkings of mythical narratives is immense: Greco-Latin myths in novels and adventure films, adaptations of Celtic, Norse, or Slavic myths in cinema, TV series and comics, the relationships between Eastern and Western myths… The list is endless and somehow overabundant compared to the smaller (though still huge) bibliography of theories of myth. The reason for this disproportion is due, in part, to the difficulty involved in abstracting general criteria. When critics seek to define myth, they must first strip it of spatial, temporal or circumstantial conditioning; only later will they be able to apply the label “myth” to this or that story.
Different key factors of our contemporary society (the phenomenon of globalisation, the dogmas of relativism, the logics of immanence) make the definition of myth even more difficult for the non-specialized public and for academic researchers alike. Indeed, academic reflection has not been immune to contemporary confusion about myth: in the wake of great psychoanalysts, sociologists or political experts, many researchers apply to their work certain conceptions of myth that identify it with individual sublimations, social deformations, or tendentious ideologies. For this reason, later on, the non-specialized public ―cheered on by the sensationalism of the press― likes to label any fallacy as “mythical”: apparently, the term “myth” cloaks the user of non-mythical discourses with a golden aura.
The volume has been coordinated by José Manuel Losada and Antonella Lipscomb. Both have traced an extensive trajectory in publishing books focused on myths: six volumes published in Italy, Germany, and the United Kingdom. Myth: Theories of a Controversial Concept comprises nine studies on myth written by university researchers from Portugal, Italy, Spain, and the United Kingdom: all of them shed light on a coherent definition of myth.
On the 28th of February 2024, the volume was awarded the 2023 International "Aristotle of Thought and Essay" Prize, bestowed by the Sial Pigmalión Editorial Group in the Boardroom of the Faculty of Philology at the Complutense University.
“La vejez inmortal. Consideraciones sobre el mitema de la inmortalidad”, Nerter, 38-39 (2023), pp. 42-48. ISSN 1575-8621.
https://mbrito.webs.ull.es/NERTER/BACK%20ISSUE-38-39.html
“L’enlèvement de Mlle de Montmorency-Boutteville et de la fille de Lope de Vega. Un événement de cour en France et un événement domestique en Espagne au XVIIe siècleˮ, Poésie de cour et de circonstance, théâtre historique. La mise en vers de l’événement dans les mondes hispanique et européen. XVIe-XVIIe siècles, Marie-Laure Acquier y Emmanuel Marigno (dirs.), París, L’Harmattan, 2014, pp. 267-276. ISBN: 978-2-343-02790-6.
“Mito y símbolo”, Philologia, Universitas, Vita. Trabajos en honor de Tomás González Rolán, J.M. Baños Baños, Mª F. del Barrio Vega, Mª.T. Callejas Berdonés y A. López Fonseca (eds.), Madrid, Escolar y Mayo Editores, 2014, pp. 525-532. ISBN: 978-84-16020-27-0.
“Hacia una mitocrítica de las emociones”, Myth and Emotions, José Manuel Losada & Antonella Lipscomb (eds.), Newcastle upon Tyne (Reino Unido), Cambridge Scholars Publishing, 2017, pp. 27-51. ISBN: 978-1-5275-0011-2.
“El mito y la era digital”, Myth and Audiovisual Creation, José Manuel Losada & Antonella Lipscomb (eds.), Berlin, Logos Verlag, 2019, pp. 43-72. ISBN: 978-3-8325-4966-4.
“Mito y antropogonía en la literatura hispanoamericana: Hombres de maíz, de Miguel Ángel Asturias”, Rassegna iberistica (Venezia), 43, 113, Giugno (2020), pp. 41-56. e-ISSN: 2037-6588. ISSN: 0392-4777.
“Cultural Myth Criticism and Today’s Challenges to Myth”, Explaining, Interpreting, and Theorizing Religion and Myth: Contributions in Honor of Robert A. Segal, Nickolas B. Roubekas and Thomas Ryba (eds.), Leiden, Koninklijke Brill NV, 2020, pp. 355-370. ISBN: 978-90-04-43502-5
“Révolution de l’image à l’avènement de la Modernité”, Literatura, crítica, libertad. Estudios en homenaje a Juan Bravo Castillo, Hans Christian Hagedorn, Silvia Molina Plaza y Margarita Rigal Aragón (coords.), Cuenca, Ediciones de la Universidad de Castilla-La Mancha, 2020, pp. 603-611. ISBN: 978-84-9044-403-0.
“La trascendencia de la ciencia ficción”, Mito y ciencia ficción, José Manuel Losada & Antonella Lipscomb (eds.), Madrid, Grupo Editorial Sial Pigmalión, 2021, pp. 39-46. ISBN: 978-84-18888-12-0.
“La littérature comparée et l’interculturel. L’exemple franco-espagnol”, Récits du Sud. Relatos del Norte, Jean-Marie Chassagne et al. (eds.), Burdeos, La Nef, 1992, pp. 73-86. ISBN: 2-85276-054-1.
“Péché et punition dans L’Abuseur de Séville”, Don Juan. Tirso, Molière, Pouchkine, Lenau. Analyses et synthèses sur un mythe littéraire, José Manuel Losada y Pierre Brunel (eds.), París, Klincksieck, 1993, pp. 7-22. ISBN: 2-252-02939-0.
“La concepción del honor en el teatro español y francés del siglo XVII. Problemas de metodología”, Estado actual de los estudios sobre el Siglo de Oro. Actas del II Congreso de la Asociación Internacional del Siglo de Oro, Manuel García Martín (ed.), Salamanca, Ediciones Universidad de Salamanca, 1993, t. 2, pp. 589-596. ISBN: 84-7481-739-0.
Newsletter SPW Agriculture en province du Luxembourg du 17-05-24BenotGeorges3
Les informations et évènements agricoles en province du Luxembourg et en Wallonie susceptibles de vous intéresser et diffusés par le SPW Agriculture, Direction de la Recherche et du Développement, Service extérieur de Libramont.
https://agriculture.wallonie.be/home/recherche-developpement/acteurs-du-developpement-et-de-la-vulgarisation/les-services-exterieurs-de-la-direction-de-la-recherche-et-du-developpement/newsletters-des-services-exterieurs-de-la-vulgarisation/newsletters-du-se-de-libramont.html
Formation M2i - Prise de parole face caméra : performer en distancielM2i Formation
Le travail en distanciel est de plus en plus incontournable et s'installe durablement dans la société, mais bien souvent, les collaborateurs d'une même entreprise n'ont pas toutes les aptitudes permettant d'être efficaces et impactants avec cette nouvelle façon de travailler : le télétravail !
Cette formation flash vous montrera qu'il est important de se professionnaliser et de faire du distanciel un agréable moment de travail.
Pour approfondir ces sujets et aller plus loin, vous pourrez vous inscrire à notre formation Prise de parole face caméra : performer en distanciel.
Formation offerte animée à distance par notre expert Camel Termellil
Résultats enquête RH 2024 Fonction Publique.pdfGERESO
Nous avons le plaisir de vous présenter les résultats de la 1ère édition de l’enquête « Professionnels RH de la Fonction Publique, comment allez-vous ? »
Forts du succès de notre baromètre annuel « Professionnels RH, comment allez-vous ? », publié pour la 4e fois en début d’année, et qui concerne principalement les professionnels RH des entreprises privées (90% des répondants exercent dans le secteur privé) nous avons souhaité, à travers ce nouveau baromètre, nous intéresser spécifiquement au moral des professionnels RH de la fonction publique.
En effet, les enjeux, les missions, les conditions de travail
des professionnels RH dans les établissements publics sont souvent bien distincts de ceux de leurs homologues du secteur privé…
Et leur moral également ! Ces différences justifiaient donc une enquête spécifique !
Merci à vous ! Vous avez été 240 professionnels RH dans
des établissements publics à répondre à nos questions et à nous livrer des aspects très personnels de votre vie de professionnel(le) des
ressources humaines du secteur public.
Alors, avez-vous un bon ou un mauvais moral en ce printemps 2024 ? Découvrez dans ce document tous les résultats de cette étude !
Sainte Jeanne d'Arc, patronne de la France 1412-1431.pptxMartin M Flynn
sainte patronne de la France, honorée en tant que défenseure de la nation française pour son rôle dans le siège d'Orléans et son insistance sur le couronnement de Charles VII de France pendant la guerre de Cent Ans.
support de formation Consignation et déconsignation des energies et produits...
Les mots 'bizarre', 'bizarrerie' / 'bizarro', 'bizarría' et leur valeur heuristique dans la critique française et espagnole du XVIIe siècle
1. Les mots bizarre, bizarrerie / bizarro, bizarría
et leur valeur heuristique dans la critique française
et espagnole du xviie
siècle
L
’organisatrice du colloque nous a mis sur la bonne piste : il n’y a pas
d’accord entre les différents dictionnaires français du xviie
siècle sur
l’adjectif « bizarre », tantôt appliqué à un aspect du tempérament,
tantôt du comportement de la personne, tantôt encore à un style. Le subs-
tantif « bizarrerie » viendrait, selon Furetière, « de l’Espagnol bizarro » – ce
qui est faux – lequel, ainsi que bizarría, se prête à des significations diverses.
Nous voudrions confronter, à partir de ce manque d’uniformité, le ren-
dement heuristique de ces mots et de ces termes dans la critique du xviie
siècle, et examiner l’hypothèse de l’utilisation du binôme bizarre / baroque
dans la critique de nos jours.
Dans un premier temps, nous aborderons trois textes français apparte-
nant à la critique littéraire, ensuite nous examinerons un texte de Baltasar
Gracián, enfin, nous nous arrêterons sur un passage d’une traduction fran-
çaise d’un ouvrage de ce même Gracián.
Les trois textes français sont tous des jugements critiques sur des auteurs
espagnols.
Le poète Castillejo vu par Sarasin
Que si nous voulons joindre les conceptions bizarres des Modernes
Espagnols avec les inventions des Anciens Grecs, je vous fourniray un
Cristoval de Castilene qui s’efforce de montrer dans sesVers que l’Amour
est entierement comme le grand Turc1
.
La citation est tirée du dialogue S’il faut qu’un jeune homme soit amou-
reux ; elle suit une série de représentations contradictoires que les Grecs
1. Les Œuvres de Monsieur Sarasin, Paris, Augustin Courbé, 1656, p. 205.
2. 60 José Manuel Losada Goya
se faisaient du dieu Amour : enfant pour les uns, vieillard pour les autres,
aveugle ou clairvoyant, etc.
Selon Sarasin, l’érotique des Espagnols est « bizarre » parce qu’elle contre-
vient aux règles. Pour démontrer que l’amour y est traité d’une façon anti-
canonique, il donne l’exemple d’un poète qui le compare au gran Turco. Sa
référence est le poème « Contra el amor », de Cristóbal de Castillejo, com-
position de 413 vers dont voici ceux qui ont retenu l’attention de Sarasin :
Gran ribaldo eres, Amor ;
el Turco no se te iguala ;
no quieres, por ser señor,
que ningún tu servidor
tenga fuerza que te vala;
y si alguno,
de pesado e importuno
y grave de soportar,
se te puede comparar,
el gran Turco es solo uno2
.
Amour, tu es un grand ribaud :
Pas même le grand Turc ne te vaut.
Roi sans partage, tu dénies
que pas un de ta valetaille
se vienne hausser à ta taille.
Et si jamais il se rencontre
quidam pesant et importun,
à tel degré insupportable
qu’il te puisse être comparable,
c’est le grand Turc et aucun autre.
« L’Amour est un grand ribaud, il surpasse en forfaits le Grand Turc ». La
comparaison se prolonge sur huit strophes. Les intrigues pour la succession
au trône de l’empire ottoman furent punies par Soliman le Magnifique, qui
n’hésita pas à sacrifier son grand vizir et la plupart de ses fils… Le sens est
clair : pour Sarasin comparer l’Amour avec un roi extrêmement jaloux de
son pouvoir est un trope « bizarre », irrégulier.
2. De Castillejo Cristóbal, Obras, J. Domínguez Bordona (éd.), Madrid, Edi-
ciones « La Lectura », 4 vols, 1926-1928, t. II, p. 214.
3. Les mots bizarre, bizarrerie/bizarro, bizarria... 61
L’impropriété de cette comparaison de Castillejo, aux yeux de Sarasin,
apparaît également à Ménage :
Cette ressemblance, dist Monsieur Menage, est bien extraordinaire,
mais j’en sçay une qui ne vous surprendra pas moins, & qui est pour-
tant de la vieille roche : que direz-vous, en effet, quand vous lirés dans
Macrobe que les Cipriots qui devoient bien connoistre Venus luy avoient
fait une Statuë qui la representoit avec une barbe (ibid., p. 205).
L’extrapolation de l’exemple de Castillejo à toute l’Espagne est injuste. On
ne doit pas passer sous silence la particularité de Castillejo. Ce poète est un
anti-platonicien de l’amour. Son Sermón de amores, écrit en quatrains octo-
syllabiques, suit, en la parodiant, la tradition de l’homilétique médiévale,
son Contra los encarecimientos de las coplas españolas que tratan de amores,
raille la rhétorique amoureuse des cancioneros,son Diálogo de las condiciones
de las mujeres, qui puise chez Boccace et chez l’Archiprêtre de Hita, d’inspi-
ration misogyne, soutient le courant littéraire qui dénigre les femmes, dia-
blesses nées pour le malheur des hommes. S’opposant aux italianisants, il
s’élève contre les chansons d’amour, contre « esos señores que echan suspiros
al viento3
». Mais ici, peu importe la querelle Garcilaso / Castillejo, qui fut
moins une querelle poétique que morale. Sarasin prend l’amour au sens
poétique, non moral. Or, c’est bien de poétique dont il s’agit.
Chapelain juge du Don Quichotte
Dans le dialogue De la lecture des vieux romans, entre Chapelain, Sarasin
et Ménage, ce dernier demande au premier sa pensée sur la galanterie des
chevaliers errants. Propos du rédacteur :
[…] à vous en dire mon sentiment, ce point de la galanterie de Lancelot
est un de ceux que je ne voudrois pas me charger de défendre, pour ce que
je suis persuadé [qu’]il est toutefois malaisé qu’il y ait une galanterie où
l’esprit n’ait point de part, et qui soit entièrement dépourvue de grâce4
.
Il reprend ici les explications déjà données ; la galanterie des héros des
« vieux romans » est « de bon sens » mais de peu d’agrément :
3. « Ces messieurs qui jettent des soupirs dans le vent ».
4. Chapelain Jean, De la lecture des vieux romans (1646), Alphonse Feillet (éd.),
Paris, Auguste Aubry, 1870, p. 29-30, www.googlebooks.com
4. José Manuel Losada Goya62
La manière de converser entre ces chevaliers et ces dames, c’est-à-dire,
selon ma supposition, celle du temps où ce livre fut écrit, est ou simple
ou naïve, sans gentillesse et sans agrément, mais de bon sens, claire et
laconique, à ne rien dire que de nécessaire, et à dire tout ce qu’il fal-
loit, morata plutôt qu’urbana ; telle à peu près que celle des Romains du
temps de Numa ; en un mot, peu galante et fort solide (p. 26).
Un scrupule d’honnêteté critique ne lui permet pas d’aller au-delà. Ce qui
suit intéresse notre propos :
Avec tout cela, si je condamnois absolument la galanterie de Lance-
lot, je craindrais de tomber dans l’inconvénient où est tombé l’auteur
de Don Quichotte quand il a fait le plaisant aux dépens des chevaliers
errants et de leurs aventures bizarres, faute de considérer, comme nous, le
temps où ils agissoient et les mœurs qui y étaient reçues (p. 30).
Nous y voilà.La manière d’aimer dans ces temps anciens allait de pair avec
l’excentricité dans la manière d’agir. Les aventures « bizarres » étaient pour
les chevaliers errants leur manière de témoigner leur galanterie à l’égard des
dames. Ils agissaient selon les mœurs (fabula morata). Leur extravagance ou
leur bizarrerie ne peuvent être jugées que par rapport aux lois de la civilité
nouvelle. L’anachronisme est une arme de la parodie.
Chapelain s’appuie sur Ménage pour désapprouver le manquement du
roman espagnol à la vérité du temps. Son opinion sur le roman de Cer-
vantès est connue5
. Il le lit comme une parodie des romans de chevalerie ;
il lui reproche de n’être pas entré dans les mœurs de la chevalerie. Curieux
hommage ! Cervantès parodie parce qu’il refuse de transporter son héros
dans le monde chevaleresque, monde qu’il connaît bien, mais qu’il raille.
Pour Chapelain, Cervantès n’écrit par conséquent qu’une histoire extra-
vagante, qu’il qualifie de « bizarre ». La réception du roman espagnol se
résume dans deux adjectifs : extravagant et fol. Ce sont des histoires bouf-
fonnes, un livre comique.
5. Voir Bardon Maurice, « Don Quichotte » en France au xviie
et au xviiie
siècle.
1605-1815, Paris, Librairie Ancienne Honoré Champion, 1931 / Genève, Slatkine
Reprints, 1974, p. 269-270 et notre Bibliographie critique de la littérature espagnole
en France. Présence et influence, Genève, Droz, 1999, nº 128, p. 179.
5. Les mots bizarre, bizarrerie/bizarro, bizarria... 63
Saint-Évremond
Dans un de ses petits traités, Sur les comédies, il affirme que les Français
ont tourné la comédie « tout-à-fait sur la galanterie, à l’exemple des Espa-
gnols », et non sur la diversité des humeurs, comme les Anciens. Il explique :
Nous avouerons bien que les esprits de Madrid sont plus fertiles en
inventions que les nôtres ; et c’est ce qui nous a fait tirer d’eux la plupart
de nos sujets, lesquels nous avons remplis de tendresses et de discours
amoureux, et où nous avons mis plus de régularité et de vraisemblance6
.
C’est le même discours. Saint-Évremond rend hommage à l’esprit fertile
des Espagnols. Au passage, il fait un double constat :
a) En France, les poètes préfèrent l’expression des sentiments là où les
Espagnols emploient leur esprit aux moyens ingénieux de faire se ren-
contrer les amants dans un pays où les femmes ne se laissent voir qu’à
peine.
b) En France, les poètes mettent dans leurs comédies plus de régularité
et de vraisemblance que les Espagnols dans les leurs.
C’est cette deuxième différence qui nous intéresse.
D’un côté, Saint-Évremond attribue l’irrégularité et l’invraisemblance
de la galanterie espagnole à un « je ne sais quel goût d’Afrique, étranger
des autres nations, et trop extraordinaire pour pouvoir s’accommoder à
la justesse des règles » (p. 372-373). D’un autre, l’univers de la chevalerie
donne lieu à un développement sur la manière d’aimer en Espagne et dans
la comedia :
Ajoutez qu’une vieille impression de chevalerie errante, commune à
toute l’Espagne, tourne les esprits des cavaliers aux aventures bizarres.
Les filles de leur côté goûtent cet air-là, dès leur enfance, dans les livres
de chevalerie, et dans les conversations fabuleuses des femmes qui sont
auprès d’elles. Ainsi les deux sexes remplissent leur esprit des mêmes
idées ; et la plupart des hommes et des femmes qui aiment, prendroient
le scrupule de quelque amoureuse extravagance pour une froideur
indigne de leur passion (p. 373).
6. Saint-Évremond, Œuvres mêlées, Charles Giraud (éd.) (1668-1689), Paris,
J. Léon Techener Fils, t. II, 1866, p. 371.
6. José Manuel Losada Goya64
C’est clair : quoique l’amour soit par nature une passion déréglée, « il n’a
rien de fort extravagant en France, ni dans la manière dont on le fait, ni dans
les événements ordinaires qu’il y produit ». Les Français ont beau dire qu’ils
aiment, ils ne font que « parler d’amour », ils mêlent « aux sentiments de
l’ambition, la vanité des galanteries ». Au contraire, « en Espagne on ne vit
que pour aimer » : dans « l’inutilité » d’une ville comme Madrid, où l’amour
est « maître », où les gens ne sont obligés à garder ni une conduite aux
affaires ni une régularité dans les plaisirs, les Espagnols donnent volontiers
dans ce qu’on appellerait « de l’extravagance » (ibid.).
C’est le postulat d’une correspondance sans accroc entre amour, littéra-
ture et société. Les Espagnols sont aussi peu réguliers dans leurs aventures
que dans leurs comédies ; toutes seront qualifiées d’extravagantes ou de
bizarres.
* * *
Venons-en au substantif bizarría, utilisé à maintes reprises par Gracián :
Tienen su bizarría las almas, harto más relevante que la de los cuerpos:
gallardía del espíritu, con cuyos galantes actos queda muy airoso un corazón.
Llévanse los ojos del alma bellezas interiores, así como los del cuerpo la exte-
rior ; y son más aplaudidas aquéllas del juicio que lisonjeada ésta del gusto7
.
C’est ainsi que commence le chapitre intitulé « De la galanterie » d’El Dis-
creto, où cette qualité – que l’auteur n’hésite pas à appliquer à l’âme – offre,
dans un discours à la première personne, une sorte de programme de l’hon-
nête et galant homme8
. Comme nous l’annoncions, la bizarría présente ici
un sens bien différent du substantif français bizarrerie et de l’adjectif bizarre
employés dans les textes plus haut référés.
7. Gracián Baltasar, El Discreto (1646), « De la galantería », Obras completas,
Emilio Blanco (éd.), Madrid, Turner, « Biblioteca Castro », 1993, t. II, p. 111-112.
Baltasar Gracián, Traités politiques, esthétiques, éthiques (L’honnête homme), « De
l’élégance d’âme », traduction par Benito Pelegrín, Paris, Le Seuil, 2005, p. 199 : « Les
âmes ont leur élégance, bien plus relevée que celle des corps : élévation d’esprit et
beauté de ses actes qui donnent le plus bel air au cœur. Les yeux de l’âme sont attirés
par les beautés intérieures comme ceux du corps par les externes ; mais le jugement
applaudit mieux les premières que le goût ne flatte ces dernières ». Nous suivrons
cette traduction pour toutes les citations suivantes.
8. Sur la traduction de bizarro par galant voir l’article précédent de Yen-Maï
Tran-Gervat, p. 43.
7. Les mots bizarre, bizarrerie/bizarro, bizarria... 65
Chez Gracián, la définition que la galanterie donne d’elle-même, dans El
Discreto, est magnanime et généreuse, ignore la médisance et la vengeance.
Trois personnages historiques le montrent : Auguste – « qui résista aux
assauts de la médisance populaire » –, Jean II d’Aragon – qui fit preuve
d’une « clémence inouïe » à l’égard de la ville de Barcelone – et Louis XII,
protagoniste d’une action célèbre lors de son accession au trône, à la mort
de Charles VIII. Arrêtons-nous à cet exemple :
Temíanle rey los que le injuriaron duque, mas él, transformando la ven-
ganza en bizarría, pudo asegurarlos con aquel más repetido que asaz apre-
ciado dicho : « ¡ Eh !, que no venga el Rey de Francia los agravios hechos al
Duque de Orléans. » Pero ¿ qué mucho quepan estas bizarrías en un rey de
hombres, cuando campean en el de las fieras9
?
L’exemplum établit un rapport direct entre galanterie, humilité et force
d’âme :
Fue siempre grande sutileza hacer gala de los desaires y convertir en
realces de la industria los que fueron disfavores de la naturaleza y de la
suerte. El que se adelanta a confesar el defecto propio cierra la boca a los
demás ; no es desprecio de sí mismo, sino heroica bizarría, y, al contrario de
la alabanza, en boca propia se ennoblece10
.
Mais c’est dans tout le chapitre que la galanterie a un sens presque exclu-
sivement spirituel. L’opposition « âmes » / « corps » est explicitée, le spirituel
l’emporte sur le matériel, le discours établit un lien entre « galantería » et
« bizarría », au point que les deux termes peuvent être pris pour synonymes.
L’équation « bizarría » = « gallardía » rapporte une faculté corporelle – la
9. Gracián B. , El Discreto , op. cit., p. 113. « À ceux qui le craignaient roi, qui
l’avaient offensé duc, faisant de la vengeance un noble et beau pardon, il dit cette
rassurante sentence plus répétée que bien appréciée : «Le roi de France ne venge pas
les injures du duc d’Orléans». Mais quoi d’extraordinaire dans la grandeur d’âme
d’un roi des hommes quand elle brille chez le roi des animaux ? » (traduction de B.
Pelegrín, op. cit., p. 199-200).
10. Ibid., p. 113. « C’est toujours une grande habileté que de faire parure de ses
disgrâces et convertir en agrément de l’industrie ce qui était désagrément de la
nature ou du sort. Qui s’avance à confesser le défaut ferme la bouche à la critique ; ce
n’est point mépris de soi mais suprême élégance et, à l’inverse de la louange, l’aveu
personnel de la faute nous honore » (traduction de B. Pelegrín, op. cit., p. 200). On
voit ici que la bizarrerie est donnée comme « élégance » alors que le traducteur pro-
pose ce même mot pour traduire le titre du chapitre De la galantería.
8. José Manuel Losada Goya66
vigueur – à l’âme de l’homme « bizarro » et « gallardo », de sorte que celui-
ci en vient à posséder une âme belle dans un corps accompli. L’anecdote de
Louis XII illustre ce rapport ; la comparaison entre le roi et le lion, tirée de
Martial, étaie la relation : plus le roi est fort en esprit, plus il a de « bizarrías »
– on notera le pluriel discontinu –, sa force d’esprit l’éloigne du vulgaire ;
elle est le propre du héros : « Todo grande hombre fue siempre muy galante,
y todo galante, héroe, porque o supongo o comunico – c’est la galanterie qui
parle – la bizarría de corazón y de condición11
». Le chant encomiastique
dédié au comte d’Aranda qui clôt le chapitre le résume ; il fait de la qualifi-
cation de « bizarro » un titre de gloire impérissable :
[…] aquél que ha eternizado juntamente su piedad cristiana y su nobilí-
sima grandeza […], consiguiendo el inmortal renombre de bizarro, de
galante, de magnánimo y héroe máximo de Aragón12
[…]
On comparera cette fin du chapitre sur la galanterie à celle du Criticón, où
Gracián invite son lecteur à entreprendre « la direction de la Vertu insigne,
de la Valeur héroïque » qui doit le mener « au siège de l’Immortalité13
», ou
encore, à la dernière maxime du quatrième chapitre de l’Oráculo manual
y arte de prudencia, où l’auteur résume, dans une formule sans équivoque,
le noyau de sa pensée : « En una palabra, santo, que es decirlo todo de una
vez14
». La série de trois mots commençant par « eses » – « santo, sano y
sabio » (saint, sain et savant) – confirme le sens spirituel de la galanterie
selon Gracián, synonyme de la bizarría.
11. Ibid., p. 114. « Tout grand homme est toujours généreux et tout généreux est
grand, car je suppose ou communique la noble élégance de cœur et d’esprit. » (tra-
duction de B. Pelegrín, op. cit., p. 201).
12. Ibid., p. 114. « Celui qui a éternisé ensemble sa piété chrétienne et sa très
grande noblesse […] lui valent l’immortel renom de généreux, de galant, de magna-
nime, de héros suprême d’Aragon » (traduction de B. Pelegrín, op. cit., p. 201).
Comme on le voit, bizarro est traduit cette fois par « généreux », assurément à cause
de la proximité du mot « héros ».
13. Gracián Baltasar, El Criticón (1651), 3e
partie, crisis XII, Obras completas,
Emilio Blanco (éd.), Madrid, Turner, « Biblioteca Castro », 1993, t. I, p. 673.
14. Gracián Baltasar, Oráculo manual y arte de prudencia (1647), CCC, Obras
completas, op. cit., t. II, p. 303. « En résumé, être saint car c’est tout dire en un seul
mot » (Traduction par B. Pelegrín dans Baltasar Gracián, Traités politiques, esthétiques,
éthiques, cité, Oracle manuel et Art de prudence, «Des instruments», p. 407). Voici la
fin d’El Héroe (Obras completas, op. cit., p. 41) : « Ser héroe del mundo, poco o nada es ;
serlo del Cielo es mucho » (« Être héros du monde est rien ou peu ; l’être du Ciel est
beaucoup » selon la traduction de B. Pelegrín, op. cit., Le Héros, p. 117).
9. Les mots bizarre, bizarrerie/bizarro, bizarria... 67
Le substantif bizarría employé dans le sens que lui donne Gracián appa-
raît répertorié dans les dictionnaires espagnols de l’époque :
–– Covarrubias :
« bizarría. Vale gallardía, loçanía15
».
–– Autoridades :
« bizarría. s.f. Generosidád de ánimo, gallardía, denuedo, lozanía
y valor. […] Saav. Empr. 59. La bizarría del ánimo se ha de ajustar à
la razón y justícia. Ov. Hist. chil. fol. 87. Marchan con grande orgullo y
bizarría ambiciosos de honra al son de sus tambóres y trompétas. Burg.
Gatom. Sylv. I. Me hallaba el alba, al madrugar el dia / con espada, broquél
y bizarria16
».
Certaines de ces définitions relèvent le double signifié de force d’âme et
de condition ; elles omettent le signifié de rattachement à la vertu présent
chez Gracián.
Le Diccionario de Autoridades offre du substantif bizarría une autre défi-
nition intéressante :
Tambien significa lucimiento, esplendór en el porte, adorno y gala, assi en
lo que mira à la persona, como de la família y casa de uno17
. Lat. Ornatus.
Splendor. Pompa, &.
Les exemples donnés à la suite (« Acuérdome de la riqueza y bizarría de las
galas, vestidos y cadenas18
»,« entró en casa de su padre, tan galán y tan bizarro
que los extrémos de la gala, y de la bizarría estaban en él todos juntos19
»), tirés
respectivement de la Vida del escudero Marcos de Obregón deVicente Espinel
(1618) et de la sixième des Nouvelles exemplaires de Cervantes respective-
15. Covarrubias, Tesoro de la lengua castellana o española (1611), Martín de
Riquer (éd.), Barcelona, Alta Fulla, 1998, p. 219.
16. Diccionario de Autoridades (1726), Madrid, Gredos, 1990, t. I, p. 612.
17. « Il signifie également éclat, splendeur de port, parure et belles tenues ainsi
que de tout ce qui concerne la personne, la famille et la maison de quelqu’un ».
18. « Je me souviens de la richesse et de l’éclat des belles tenues, des vêtements et
des chaînes », la suite du texte cité par le Diccionario ajoutant : « que esta mañana
resplandecen en tan grandes Principes » (« qui resplendissent ce matin-là en de si
grands Princes »).
19. « […] il entra chez son père si galant et si élégant que la quintessence de la
galanterie et de l’élégance étaient réunies en lui ».
10. José Manuel Losada Goya68
ment, concernent l’acception plus physique du mot20
. Bizarría signale dans
ces cas la manière élégante et distinguée de s’habiller.
C’est une acception qu’Oudin avait déjà répertoriée dans son dictionnaire
bilingue :
bizarria, galantise, brauerie, pompe, piaffe en habillemens, bigarrement,
bigearrerie, fantasie, diuersité21
.
Le mot « pompe » se trouve dans les deux dictionnaires,mais dans celui de
Autoridades il est en latin : il a le sens neutre d’éclat et de magnificence, alors
que chez Oudin il connote l’emphase et le ridicule. Le reste des sens, sauf,
peut-être, la diversité, renvoie à l’extravagance dans la parure, une accep-
20. Voir aussi le Quichotte, 1e
partie, chap. XXVII : « De allí a un poco salió de una
recámara Luscinda, acompañada de su madre y de dos doncellas suyas, tan bien adere-
zada y compuesta como su calidad y hermosura merecían, y como quien era la perfec-
ción de la gala y bizarría cortesana » (« Un peu après, Luscinde sortit d’un cabinet de
toilette, accompagnée de sa mère et de deux suivantes, vêtue et parée comme l’exi-
geaient sa naissance et sa beauté, et comme l’avait pu faire la perfection de son bon
goût », trad. Viardot, 1850, t. I, p. 369) ; le Persiles y Segismunda, livre III, chap. 1 :
« la hermosura de las mujeres admira y enamora ; la bizarría de los hombres pasma »
(« la beauté des femmes suscite l’admiration et l’amour ; le port galant des hommes,
la stupéfaction ») ; Rinconete y Cortadillo : « Llegaron también de los postreros dos
bravos y bizarros mozos, de bigotes largos, sombrero de grande falda, cuellos a la valona,
medias de color… » (« Parmi les derniers arrivèrent aussi deux braves et élégants
gaillards, avec la moustache longue, le chapeau à large bord, le collet à la wallonne,
les bas de couleur…», trad. Viardot, 1891, p. 20). ; El Casamiento engañoso : « Entró
con ella el señor don Lope Meléndez de Almendárez, no menos bizarro, que ricamente
vestido de camino… », etc. (« Derrière elle entra le seigneur don Lope Melendez
de Almendarez, vêtu d’un habit de voyage aussi riche qu’élégant…», trad. Viardot,
1838, t. I, p. 239).
21. Oudin, Tesoro de las dos lenguas francesa y española, éd. 1607, s. p., www.
google.books ; éd. 1645 : « Bizarría, galantise, braverie, pompe, piaffe en habille-
mens, bigarrement, bigearrerie, fantasie, diversité », s. p. ; éd. 1675 : « Bizarría, f.
Galantise, braverie, pompe, piaffe en habillemens, bigarrement, bigarrerie, fantasie,
diversité », p. 152. Oudin donne aussi, dans la partie Français / Espagnol : « Bizar-
rerie, mohina » (Seconde partie du Trésor des deux langues espagnolle et françoise,
éd. 1645, s. p.) et « Bizarrerie, f. Mohina, bizarrería » (Trésor des deux langues fran-
çoise et espagnole. Seconde partie, éd. 1675, p. 69) ; le sens d’irritable est d’origine
italienne (voir Corominas Joan, Breve diccionario etimológico de la lengua castel-
lana, Madrid, Gredos, 3e
édition, 1973, p. 97). Jean Pallet est plutôt sobre dans sa
définition : « bizarría, Braverie, Galantise » (Dictionnaire tresample de la langue
Espagnole et Françoise, 1604) ; la « galantise » ou « gallantise » vaut « galanteria, gala,
galania, biçarria, loçania », ce qui est en contradiction avec la « braverie » : « baldro-
nería, bravata, bravura, fanfarronería ». Pour « bizarro », il donne « Galant, brave ».
11. Les mots bizarre, bizarrerie/bizarro, bizarria... 69
tion étroitement liée à l’extravagance dans la composition dont parlaient les
écrivains français plus haut cités.
* * *
Dans Oráculo manual y arte de prudencia du même Gracián, nous lisons
à la maxime XX :
Hombre de su siglo.
Los sujetos eminentemente raros dependen de los tiempos. No todos
tuvieron el que merecían, y muchos, aunque lo tuvieren, no acertaron a
lograrle. Fueron dignos algunos de mejor siglo, que no todo lo bueno triunfa
siempre ; tienen las cosas su vez, hasta las eminencias son al uso ; pero lleva
una ventaja lo sabio, que es eterno, y si éste no es su siglo, muchos otros lo
serán22
.
La traduction française, par Amelot de la Houssaie (1684), donne :
L’Homme dans son siècle.
Les gens d’éminent mérite dépendent des temps. Il ne leur est pas venu
à tous celui qu’ils méritaient ; et de ceux, qui l’ont eu, plusieurs n’ont
pas eu le bonheur d’en profiter. D’autres ont été dignes d’un meilleur
siècle. Témoignage, que tout ce qui est bon, ne triomphe pas toujours.
Les choses du monde ont leurs saisons, et ce qu’il y a de plus éminent, est
sujet à la bizarrerie de l’Usage. Mais le Sage a toujours cette consolation,
qu’il est éternel. Car si son siècle lui est ingrat, les siècles suivants lui font
justice23
.
Dans son texte, Gracián ne parle ni de gens vertueux ni de saints, mais de
« sujetos raros », de grands personnages que voient passer les siècles, d’êtres
qui, par leurs qualités, sont nettement au-dessus du vulgaire. Il s’agit d’une
excellence qui n’a aucun point commun avec la « galantería », la « bizarría »
et la « gallardía del espíritu » que nous avons trouvées dans El Discreto.
L’Espagnol part du constat que ces éminents personnages sont peu nom-
breux – ils sont « raros » (rares) –. Leur excellence et leur rareté n’échappent
pas à la loi du siècle : elles ne sont guère reconnues de leur vivant – qu’on
22. Gracián, Oráculo manual y arte de prudencia, XX, op. cit., p. 200.
23. Gracián, L’Homme de cour, traduction de Amelot de La Houssaie, Sylvia
Roubaud (éd.), Paris, Gallimard, « Folio Classique », 2010, p. 309.
12. José Manuel Losada Goya70
veuille nous pardonner cette glose, Gracián les avait en horreur –, ce qui,
soit dit en passant, invite à retoucher tel jugement qui fait de l’Oráculo
manual un livre destiné au courtisan aspirant au succès, qui voudrait faire
partie d’une élite non méritante mais sociale24
.
Or, dans sa traduction, comment Amelot de la Houssaie traduit-il le syn-
tagme « hasta las eminencias son al uso » ? Au propre, par une amplifica-
tion superflue. Eût-il traduit « ce qu’il y a de plus éminent ‘‘est soumis à
l’usage’’ », Gracián n’aurait pas été trahi. En choisissant de traduire comme
il l’a fait, Amelot donne au substantif français « la bizarrerie », le sens réper-
torié dans les dictionnaires de l’époque :
–– Richelet :
Bizarrerie, s. f. Caprice, fantaisie, folie. [C’est une Bizarrerie la plus
ridicule du monde25
].
–– Furetière :
Bizarrerie. s. f. Caprice, chose extraordinaire. [Il y a de la bizarre-
rie dans beaucoup d’ouvrages de la nature, dans la variété des coquilles,
des pierres, des animaux. Cet homme est bourru, est sujet à de grandes
bizarreries]26
.
–– Académie :
Bizarrerie. s. f. Humeur bizarre, extravagance. [Estrange bizarrerie.
Faire quelque chose par bizarrerie, par pure bizarrerie. Cet homme est
sujet à de grandes bizarreries]27
.
L’acception ne varie pas de manière considérable entre le substantif et
l’adjectif28
.Il faut donc entendre : les plus éminents sont soumis aux caprices
et fantaisies du temps. En introduisant dans sa traduction « bizarrerie »,
Amelot s’éloigne du sens que Gracián donne à « bizarría ».
24. Pelegrín Benito, Histoire de la littérature espagnole, Paris, Fayard, 1993, t. I,
p. 726.
25. Richelet P., Dictionnaire françois, 1680, p. 79.
26. Furetière A., Dictionnaire universel, 1690, s. p.
27. Dictionnaire de l’Académie, 1694, t. I, p. 102.
28. Richelet : « Fantasque, bourru, capricieux, fâcheux, importun, désagréable ».
Furetière : « Fantasque, qui a des mœurs inégales, des opinions extraordinaires &
particulieres », Académie : « Fantasque, extravagant, capricieux ».
13. Les mots bizarre, bizarrerie/bizarro, bizarria... 71
En fait, même si cela peut surprendre, Amelot suit Honoré d’Urfé, ce
sixain du Sireine le montrera :
Combien est bizarre l’enfant
Qui de ces cœurs est triomphant,
À se voir autant comme ils peuuent
Il a mis leur bien plus parfait,
Et or au contraire il a fait,
Qu’à se voir tout leur mal ils treuuent29
.
Le texte est inspiré d’une quintilla de la Diana de Montemayor :
Extraño efecto d’amor,
verse dos que se querían
todo cuanto ellos podían,
y recebir más dolor
qu’al tiempo que no se vían30
.
Dans les textes espagnol et français, les deux amants se lamentent du
voyage que Sireine – Sireno, dans l’œuvre espagnole – doit faire vers des
terres lointaines, suivant la volonté de son maître. Finalement, tous deux
se résignent à leur sort et se quittent en se promettant un éternel amour.
L’« effet d’amour » est « étrange » (« extraño ») : plus les deux amants se
regardent, plus ils souffrent, selon une antithèse habituelle de la « poesía
amatoria ».
Observons qu’en choisissant l’adjectif « bizarre », Honoré d’Urfé donne
à son adaptation de l’espagnol un sens distinct de l’original : celui de fan-
29. Le Despart de Sireine, dans Le Sireine de Messire Honoré d’Urfé, Paris, Jean
Micard, 1618, str. LXVII, p. 12, www.googlebooks.com. Voir aussi l’édition de Paris,
T. du Bray, 1604, p. 67. Le manuscrit signé de l’auteur est daté de 1599.
30. De Montemayor Jorge, Los siete libros de La Diana (1559), libro segundo,
v. 150-154, Asunción Rallo (éd.), Madrid, Cátedra, 1993, p. 176. Nous sommes de
l’avis qu’Urfé s’est inspiré de l’Espagnol pour en faire une adaptation-traduction
en vers du chant de la nymphe qui se trouve dans le livre II de La Diana, et qu’il
nomme Le Départ de Sireine (L’Absence de Sireine et Le Retour de Sireine sont une
création de l’auteur français). En effet, si l’on en croit la Lettre-traité sur l’origine des
romans, l’auteur du Sireine aurait pris « tant d’autres choses et l’argument même
de son Sireine de la Diane de Montemayor », Huet Pierre-Daniel, Lettre-traité de
Pierre-Daniel Huet sur l’origine des romans […] suivie De la lecture des vieux romans
par Jean Chapelain, F. Gégou (éd.), Paris, A.-G. Nizet, 1971, p. 98 ; voir notre Biblio-
graphie critique, op. cit., nº 270, p. 334-336.
14. José Manuel Losada Goya72
tasque, capricieux. Deux ans après la publication du Sireine, Nicot réperto-
rie dans Le Thrésor de la langue française (1606) cette phrase de Pasquier :
« Ta nature s’est trouuée en moy fantastique & bizarre ». « Fantastique » y
côtoie « bizarre » et vaut « capricieux », ou s’en approche, comme le prouve
cette citation du même Nicot,au mot Fantasie : « Il luy est venu en fantasie,
Cupido eum incessit ».
Résumons.
À partir des critères du classicisme, Sarasin, Chapelain et Saint-Évremond
traitent de « bizarre » la manière de composer des Espagnols. Selon eux,
elle pèche par invraisemblance ou par extravagance. Les critiques français
prennent le mot dans son acception esthétique.
Les dictionnaires français du xviie
siècle, de Nicot à l’Académie, réper-
torient également l’adjectif « bizarre » et le substantif « bizarrerie » dans le
sens d’extravagant et d’extravagance, respectivement, mais le plus souvent
dans leur acception psychologique (fantasque, capricieux), celle-là même
que nous trouvons chez Urfé.
Rien de tel chez Gracián, où le signifiant « bizarría » désigne des qualités
de l’âme autant que du corps.
Les dictionnaires espagnols de l’époque et les écrivains comme Cervan-
tès et Vicente Espinel donnent à ce substantif et à l’adjectif correspondant
(« bizarría », « bizarro ») une acception physique et d’apparence. Même cas
pour les dictionnaires français bilingues,Oudin notamment (le plus réédité).
Que conclure ?
Rapportés à une manière de composer ou à une manière de paraître en
société, « bizarre » et « bizarrerie » sont, dans la langue des auteurs français
du xviie
siècle, des termes négatifs. La langue française y a recours pour
désigner une entorse à une règle. Nous sommes très loin de Gracián, chez
qui la bizarría est une composante de l’excellence.
Convenons qu’à sa manière Gracián accepte aussi une entorse à une
norme : chez lui la bizarría est une qualité associée à la rareté, elle est en
dépôt seulement chez les gens de grande excellence en vertu et en mérite.
On trouve aussi un sème d’exception dans la façon qu’ont de s’habiller les
gens de condition en Espagne. Mais le mot, dans ce cas, a toujours une
dénotation positive. Chez Gracián l’opposition entre extérieur et intérieur
n’est pas marquée.Au contraire. On ne doit rien y voir qui nous oriente vers
15. Les mots bizarre, bizarrerie/bizarro, bizarria... 73
un baroque réduit à l’extériorité. D’ailleurs, en Espagne, barroco n’a jamais
fait concurrence à bizarro (qui n’a jamais eu, contrairement à barroco, de
connotation négative).
Peut-on utiliser l’adjectif « bizarre » et le substantif « bizarrerie » pour les
appliquer à des champs notionnels relevant du baroque ? Sans doute. Ce ne
serait même pas par dérive sémantique, comme ce fut le cas lors de l’intro-
duction du mot baroque pour désigner un art, un style, en rupture avec
le classicisme, à partir d’un terme d’origine portugaise de sens fortement
éloigné. D’ailleurs, plus que de dérive sémantique, c’est de proximité de
signifiés qu’il convient de parler, ce qui expliquerait les glissements relevés.
Un sème commun les rapproche sinon les associe : celui d’irrégularité, de
décrochement par rapport à une norme. Furetière a déjà relevé qu’une perle
était déclarée « baroque » lorsqu’elle était irrégulière, et nous venons de voir
que, dans la langue du xviie
siècle, « bizarre » est souvent pris négativement.
Au demeurant il procède de l’italien où il signifie coléreux, dans un premier
temps, puis extravagant. Oui, en français « bizarre » et « baroque » peuvent,
sinon constituer un binôme, être considérés comme voisins. Si « bizarro »
et « bizarría » sont susceptibles de détournement de sens en espagnol, c’est
précisément parce qu’ils sont chargés de positivité, ce dont les traducteurs
ne se sont pas toujours avisés. Les gens d’esprit non plus.
José Manuel Losada Goya
Université Complutense de Madrid